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L'arrivée des Warocqué à Morlanwelz

  L'Histoire de Morlanwelz

Table des matières

 
L’arrivée des Warocqué
à Morlanwelz

Ce n’est pas sans un serrement de cœur que les Morlanwelziens ont vu, il y a quelques semaines (fin mars), tomber dans un nuage de poussière mais sans bruit le châssis à molettes du puits Saint-Arthur à Mariemont.

Au moment où, par suite d’une évolution économique inéluctable, on assiste au démantèlement et à la disparition progressive de ces fosses qui, pendant cent cinquante ans, ont fait la prospérité de la puissante société anonyme des charbonnages de Mariemont-Bascoup et conséquemment de Morlanwelz, il est intéressant, me semble-t-il, d’évoquer l’arrivée des Warocqué à Mariemont (1).

Bien plus grand que le parc actuel qui comprend quarante-cinq hectares, celui du XVIIIème siècle avait absorbé une grande partie de la forêt; il s’étendait, sur une superficie d’environ deux cent cinquante hectares, de la "fontaine de Spa" au "Colombie" en suivant grosso modo les limites de La Hestre, arrivait au carrefour de l’Olive, à la "Réunion" et à l’actuelle rue de la Portelette, englobait toute la Faisanderie jusqu’à l’emplacement du vieil hôpital Louise.

Riche en charbon affleurant, il avait été exploité dès le XIVème siècle et, entre 1759 et 1773, le prince Charles de lorraine, gouverneur de nos provinces au nom de sa belle-sœur, l’impératrice d’Autriche Marie-Thérèse, avait tenté t’en tirer profit.

L’expérience, dont nous parlerons prochainement, s’était soldée par un cuisant échec financier. Dès lors, le domaine était retourné à sa destination première, voulue par Marie de Hongrie au XVIème siècle, par les archiducs Albert et Isabelle au XVIIème siècle, par les archiducs Albert et Isabelle au XVIIème, par l’empereur Charles VI et par la gouvernante Marie-Elisabeth au XVIIIème : une résidence d’été et un vaste terrain de chasse.

La fin du XVIIIème siècle, troublée par la révolution dite brabançonne puis par la conquête française, vit plusieurs candidats demander l’autorisation de reprendre l’activité charbonnière et même exploiter sans y être habilités.

1794, année de la seconde conquête française, fut tragique pour Mariemont : l’abbaye de l’Olive et le château reconstruit en 1756 furent incendiés par les troupes républicaines. Abandonné et déclaré bien national, le domaine fut saccagé par les pillards, avides de récupérer pierres et plomb ou de se constituer une réserve de charbon et de bois. A en croire un rapport de 1795, plus de cent personnes pillaient chaque jour le parc, ce qui incita les autorités républicaines à intervenir efficacement et à accorder une concession régulière.

S’engagea alors une lutte acharnée entre les amateurs tant belges que français. D’un côté, deux capitaines, Duplan et Desfourneaux, originaires de Bourges; de l’autre, Charles Sébille, de Binche, Wolf de Mons, Couteau de Bois d’Haine, et Fauconnier d’Houdeng- Goegnies.

Duplan et Desfourneaux, renseignés par des compagnons de bataillon, les fils Sébille, et cantonnés un moment à Mariemont, purent juger ou connaître par la rumeur publique l’intérêt de ce parc riche "de deux ou trois veines de charbon d’une qualité supérieure à celles de tous les autres charbons de ce pays…et épaisses de cinq à six pieds" au lieu de deux pieds à deux pieds et demi habituels.

Prétendant qu’ils étaient les découvreurs de cette richesse, ces français revendiquèrent et obtinrent du Comité du Salut Public la concession pour une durée de cinquante ans.

Inexpérimentés, ils durent s’associer le père Sebille auquel ils cédèrent un tiers de la concession, puis des bailleurs de fonds tels que Fléchère, cultivateur à Saint-Vaast, Daubresse, directeur de charbonnage à Wasmes, Ardache, notaire à Frameries, etc.

Incapables de répondre aux conditions d’octroi de la concession qui accordaient six mois seulement pour lancer l’entreprise, extraire à une profondeur de cent toises ( environ 175 mètres ) et installer une machine à vapeur, cette association se vit dénoncée par un groupe de Montois ayant à leur tête le juriste Charles Duvivier, membre puis président de l’administration départementale. Après un premier essai infructueux en 1795, ces concurrents obtinrent gain de cause : en 1797, le Directoire retira l’acte de concession pour le céder un moment à Sebille puis à un marchand de charbon montois, J.B.Hardempont (1791 et 1801). Celui-ci avec Charles Duvivier, Isidore Warocqué, beau –frère de ce dernier, Nicolas Warocqué, frère de Isidore, et un banquier parisien, Tiberghien, constitua rapidement une société de 32 actions pour répondre aux conditions d’une exploitation moderne.

La famille Sebille revint naturellement à la charge, invoquant la conduite héroïque de deux fils lors de l’expédition d’Egypte. En vain, car à cet argument patriotique, Isidore Warocqué opposa les relations et l’argument financier : un prêt sans intérêt à l’administration départementale, la remise en activité des grands-routes Mons-Maubeuge, Valenciennes-Gand, Mons-Bruxelles, tournai-Valenciennes, la perception du droit de barrière (lever les impôts sur le charroi) à Jumet, Charleroi, Gosselies, Frasnes-lez- Gosselies, Ath, Lessines, Petit-Enghien, Pecq, Péruwelz, etc. Grand acquéreur de biens nationaux, parfaitement introduit dans tous les rouages de la vie publique, Isidore Warocqué avait "la consistance d’un grand capitaliste, d’un riche banquier, tandis que sa femme ou par une louable modestie ou par une très grande soif de gain, continuait à tenir une boutique d’étoffes de soie". Nicolas, de son côté, avait aussi rempli son devoir envers la République : il avait servi de Jemappes à Fleurus, avant de rentrer à Mons pour continuer ses affaires.

L’arrêté de concession à Hardempont précisait aussi qu’il fallait extraire le charbon à une profondeur minimum de deux cent mètres, établir sue les travaux une machine à vapeur et pour parvenir à une "exploitation solide, régulière et avantageuse", employer "tous les moyens que l’art prescrit et qui seront indiqués par le Conseil des Mines", mettre l’exploitation en pleine activité dans les six mois au plus tard sous peine de déchéance.

Les limites de la concession furent fixée sur place par le secrétaire-général de la préfecture, le citoyen Lavallée, accompagné du sous-préfet de l’arrondissement de Charleroi, le citoyen Troye, du concessionnaire, le citoyen J.B. Hardempont, et "d’un grand nombre de citoyens des communes voisines"

La concession s’arrêtait à l’est à la haute chaussée, c’est-à-dire à la chaussée Brunehault; au nord, à la "plaine" de Chapelle-lez-Herlaimont et au cent bonniers de l’abbaye de l’Olive; à l’ouest, à la plaine dite des quatorze bonniers et à La Hestre; au sud, à la plaine de Haine-Saint-Pierre et au village de Morlanwelz.

La Société se constitua devant le notaire Dethuin de Mons le 20 messidor an X (9 juillet 1802). Le capital initial fut représenté par trente-deux actions; Isidore Warocqué, Charles Duvivier, J.B.Hardempont et P.F. Tiberghien en reçurent chacun sept; Nicolas Warocqué, quatre. L’acte notarial détaillait toute l’organisation : aucun propriétaire n’est réputé membre de la société ni admis à délibérer, lors des quatre assemblées annuelles prévues à des jours fixes, s’il ne détient au moins quatre actions, "cependant les héritiers d’un actionnaire décédé ayant droit de délibérer pourront par un d’eux muni de pouvoirs de ses cohéritiers, représenter le défunt aussi longtemps qu’ils possèderont le nombre d’actions qui donnaient au défunt le droit de voter". En cas de vente de titres par un actionnaire, la société se réserve le droit de préemption. Lors des mises de fonds successives, si un actionnaire n’apporte pas sa cote part au bout d’un an, la société fera procéder à la vente de ses titres au plus offrant entre ses membres à l’exclusion de toute autre personne. En d’autre termes, les associés voulaient garder le contrôle financier de l’entreprise en n’importe quelle circonstance.

Le lendemain de l’acte constitutif de la société se tint la première assemblée générale, au cours de laquelle on prit diverses dispositions importantes. Sur le plan financier, on décida des mises de fonds; sur le plan administratif, on fixa les attributions de chacun : Isidore Warocqué devint le trésorier, sans rétribution; Craincaille, sous-directeur avec un traitement de six cents livres; Ch.Fontaine, receveur, et Jean Gerot, directeur des travaux, devaient toucher chacun douze cents livres; Nicolas Warocqué, logé gratuitement dans la maison dite de Gamond (1), fut investi de tous les pouvoirs "pour surveiller, activer et diriger les travaux, faire rendre compte aux employés, arrêter les dits comptes et conserver les propriétés". Son traitement ? 3.300 livres par an, soit environ douze fois le salaire moyen d’un mineur.

Dès le 22 décembre 1802, l’assemblée générale décida de revendiquer la concession de Chaud Buisson ( environ 400ha ) limitée au nord et à l’est par le parc, au sud-est par un tronçon de la Chaussée Brunehault, à l’ouest par la plaine de Péronne. C’est ce qu’on appelait au XVIIIème siècle "la plaine de Morlanwelz", mais qui n’avait été que modestement exploitée jusqu’alors. Cette faveur fut accordée par Napoléon le 9 janvier 1805.

Puis leurs regards se portèrent sur les gisements de l’Olive. Le Montois Ghislain Drion en avait reçu la concession pur quinze ans en 1755. Incapable de financer seul les recherches, il avait dû faire appel à des associés pour trouver les capitaux indispensables. Il avait obtenu le renouvellement de sa concession en 1769, moyennant certaines conditions qui seront détaillées dans un prochain article. Mais en 1773, on s ‘était aperçu que les sources de la fontaine minérale, celles qui alimentaient l’abbaye et le village se tarissaient et que même le château risquait de manquer d’eau.

On en avait attribué la responsabilité partielle à cette exploitation de l’Olive et du coup Charles de Lorraine en avait interdit les travaux et ordonné de combler les fosses.

Lors de l’arrivée des troupes françaises, Drion et ses associés ou leurs héritiers avaient repris l’exploitation. mais leurs ressources insuffisantes les mirent dans uns situation critique. L’ingénieur en chef du département, Miché, rédigea un rapport défavorable. A ce point, qu’en 1806, en dépit d’une violente opposition des intéressés, Napoléon accorda leur concession à la société de Mariemont, moyennant indemnité de 35.000 livres aux anciens concessionnaires.

Au total, la Société de Mariemont détenait un vaste champ d’exploitation, d’une superficie de 1.150 hectares.

Elle deviendra la plus importante de la région sous l’énergique impulsion de Nicolas Warocqué. Celui-ci y trouva son compte par une augmentation de ses appointements et par une participation aux bénéfices.

En 1829, lorsque le gouvernement hollandais vendit la forêt à la société charbonnière, Nicolas Warocqué s’en réserva un quinzième ( environ 28ha ). Il y fit aménager un vaste jardin à l’anglaise au centre duquel il construisit en 1830 le château qui correspondait à la partie incendiée à la Noël 1960.

Gros acquéreur de terrains, il devint maire de Morlanwelz en 1805.

A sa mort, en 1838, il laissait une fortune appréciable (2) que ses descendants gérèrent avec un tel profit que le dernier d’ entre-eux, Raoul, mort en 1917, put "passer au début du siècle pour l’homme le plus riche du pays" (3).

Il s’agit de la maison du docteur Delval, directeur de la station thermale, qui avait été achetée au XVIIIème siècle pour y loger le surintendant

(1) sources : R.Darquenne, Le domaine de Mariemont à l’heure Républicaine – la formation de la société minière, dans Annales du Cercle Archéologique du Centre, tomeI, fascicule I, 1962, pp.36-65 – F.Hayt, les Charbonnages de Mariemont-Bascoup ( des origines à 1830), dans Documents et Rapports de la Société…d’Archéologie de Charleroi,t.48, 1950, pp.147-250-Archives diverses.
(2) Dans la première matrice cadastrale (+ /- 1835), Nicolas Warocqué figure comme propriétaire de 212 parcelles représentant un total de 108 ha, à peu près 14% de la superficie de la commune.
(3) P.Faider, article sur Raoul Warocqué, dans la Biographie Nationale

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